
Par Joseph KANDA
Le processus de décentralisation au Togo a connu une avancée significative depuis 2019 avec les élections municipales qui ont permis de remplacer les délégations spéciales par des conseillers municipaux qui dirigent les communes. Ces dernières, considérées comme des micro-états, sont appelées à se prendre en charge pour leur propre développement. Pour ce faire, elles ne peuvent se contenter uniquement des Fonds d’appui aux collectivités territoriales (FACT) mises à leur disposition par l’Etat.
La contribution locale est capitale, et cela passe par le payement des différents taxes et impôts par les citoyens. Les trois communes de la préfecture de Tchamba sont dans une dynamique de développement locale avec des Plan de développement communaux (PDC) dont l’exécution nécessite des moyens. La mobilisation des ressources n’est pas aisée pour ces communes qui font face souvent à des contribuables réticents. Quelle est l’importance de la fiscalité pour le développement d’une localité ? Quelles appréhensions les populations ont des taxes et impôts qu’on leur impose ? A quoi servent les différentes recettes de la fiscalité locale dans les communes de Tchamba.
Utilité des taxes et impôts
La fiscalité locale existe bel et bien à Tchamba, notamment dans ses trois communes. Le chef du contrôle préfectoral des impôts de Tchamba, Sourou Sablikou explique que la fiscalité locale est l’ensemble des impôts et taxes qui visent à financer les besoins des collectivités locales, ce qui permet d’améliorer la gestion des affaires publiques. Selon lui, elle stimule les investissements et le développement, à savoir la construction des marchés, écoles et autres infrastructure socioéconomiques. « Il y a certaines de ces taxes que nous recouvrons pour les mairies. Vous verrez que, de temps en temps, nous sommes en collaboration avec les municipalités pour voir dans quelles mesures elles peuvent nous aider à mieux communiquer avec la population pour l’amener à se mettre en règle avec la fiscalité », a-t-il ajouté. D’après lui, les ristournes qui reviennent aux collectivités territoriales leur permettent de répondre aux besoins primaires des populations.

Grace aux recettes fiscales encaissées par la mairie de la commune de Tchamba 1, plusieurs infrastructures ont été réalisées à en croire le maire de ladite commune, Ousman Katafara. « Nous avons construit une maternité dans le canton de Larini, fait des extensions électriques dans des quartiers urbains et péri urbains. Des latrines publiques ont été construites ou réhabilitées », a-t-il confié. Quant au réseau routier, on peut constater des travaux en cours d’exécution dans quelques quartiers de la ville pour faciliter la circulation des biens et des personnes. « Payer ses taxes, c’est contribuer à son propre développement », a conclu le maire.
Les contribuables difficiles à convaincre

La plupart des contribuables sont réticents quand il s’agit de payer les impôts et taxes. Des personnes interviewées déclarent qu’elles ne voient pas les résultats des actions des communes sur le terrain. Mlle Alice, commerçante au grand marché de Tchamba se plaint du mauvais état de la route qui donne accès à l’entrée sud dudit marché. « Tout le temps, des agents de la marie viennent nous importuner avec des histoires de tickets. Pourtant la route qu’on emprunte pour venir au marché du côté sud est en mauvais état. En saison de pluie c’est un vrai calvaire. Il nous arrive des fois de perdre nos marchandises suite aux accidents sur cette voie. Je me demande ce qu’ils font avec l’argent qu’ils collectent ».
Un vendeur d’appareils ménager, au centre-ville, sous couvert d’anonymat dit n’être pas convaincu du bienfondé des taxes et impôts. « On se défend chaque jour pour gagner de quoi nourrir nos familles, et au lieu de nous aider ils viennent encore prendre le peu que nous avons », s’indigne-t-il.
D’autres par contre ont compris le bien-fondé de la fiscalité locale : « Nous déclarons dès le début d’année, souvent jusqu’au 15 février, toutes nos transactions de l’année précédente. L’impôt n’est pas né hier. Nous avons compris que pour que le pays puisse aller de l’avant il faut des fonds, et nous n’allons pas attendre les aides de l’extérieur. Donc nous devons participer au développement local en payant les taxes », a confié Kodjo, promoteur de bar-restaurant.
Pour Koffi gérant d’une poissonnerie dans un quartier de la ville, le payement des taxes et impôts est un devoir civique, mais il souhaite que ces fonds servent vraiment à réaliser les projets de développement. « Nous avons l’impression parfois que c’est juste une partie de notre argent qui est utilisée pour réaliser quelques projets et le reste prend une destination inconnue », a-t-il dit.
A ceux qui sont réticents au payement des impôts et taxes, le maire de la commune Tchamba 1 répond : « Ce n’est pas à la mairie qu’on paye les taxes, on se paye les taxes pour le développement de sa propre commune. Donc nous prions tout le monde d’être toujours assidu à nos sessions, pour poser des questions qu’il faut pour comprendre ce qui est fait avec leur contribution ou la destination de l’argent issu des taxes ? leurs désirs ? afin qu’ensemble nous pussions construire notre commune »
Les taxes et impôts demeurent, quoi qu’il en soit, une source de financement incontournable dans le processus de développement de toute nation. Les communes ne peuvent atteindre leurs objectifs de développement qu’à travers ces taxes et impôts. D’où la nécessité d’une conscientisation continue des contribuables sur leur utilité. La reddition des comptes et la visibilité des réalisations rendues possibles grâce à ces fonds pourront amener les contribuables à payer les taxes et les impôts.