
Par Fidèle PINIZI
L’importance de l’industrie touristique dans l’économie d’un pays ou d’une localité n’est plus à démontrer. La préfecture de Bassar est une zone touristique par excellence eu égard à son patrimoine culturel et les divers sites et pittoresques dont il dispose. L’apport des hôtels est primordial dans ce secteur puisque les touristes doivent se loger et se restaurer.
L’hôtel Bassar, qui se doit d’exploiter cette opportunité pour se relancer et se donner une place de choix dans le milieu est dans un état de délabrement très avancé. Conséquence, il est moins fréquenté par les touristes. La structure tourne au ralenti. Jadis florissant avec un taux de fréquentation de 89%, l’hôtel Bassar qui porte le nom de la ville qui l’a vue naître a perdu aujourd’hui ses lettres de noblesse avec la crise qu’a connue le pays dans les années 90 entraînant la rupture des relations avec plusieurs pays développés et des partenaires en développement. Pour le directeur de cet hôtel, Amona Masabalo, il est important, voire impérieux de le réhabiliter afin qu’il puisse répondre aux exigences les plus élémentaires des clients.
Les atouts de l’hôtel Bassar
Depuis un grand moment, les bâtiments de l’hôtel sont en décrépitude, nécessitant une réhabilitation. Le président de l’Association tourisme et vie (ATV) basée à Bassar, Bassabi Lantame, un cadre du ministère de la culture et du tourisme, révèle que plusieurs tentatives depuis 2013 jusqu’à ce jour pour rénover cet hôtel avec le fonds de promotion et de développement touristique ont été vaines : « Malgré son état de délabrement l’hôtel dispose des atouts qui constituent ses forces ». M. Bassabi estime que la première force de cet édifice est sa situation géographique. « C’est indéniable, ce que nous reconnaissons à nos prédécesseurs, c’est le choix du site. Il est pittoresque. Cette structure est géographiquement bien située. Cet hôtel perché sur le flanc ouest du mont Barba-Bassar, est un magnifique joyau. Il offre une vue splendide sur la ville avec un cadre reposant, sympathique et luxueux par excellence pour le confort. C’était le seul réceptif de la préfecture depuis sa création en 1976 par l’Etat togolais. Le cadre est calme et arboré de grands manguiers qui protègent la bâtisse. A partir de Bassar on peut rallier Kara, Sokodé et Djarkpanga. On peut aussi facilement se rendre au Ghana voisin. La région est très riche en termes de sites touristiques et de culture pouvant attirer les touristes », a-t-il indiqué.
Pour les sites touristiques, on note, entre autres, le mont Barba-Bassar et son histoire, les Hauts fournaux de Nangbani et de Bangeli qui permettaient l’exploitation artisanale du fer dans les temps anciens, les vestiges allemands de Tchatchaminadè, le vestibule du chef du canton de Bassar, le barrage de Kabou, la rivière Kankassi de Bapuré aux crocodiles sacrés dans la préfecture de Dankpen. Le patrimoine immatériel de la localité est également très riche, avec les danses « T’bol » ou danse du feu, « Kourgnima » ou danse des jeunes filles vierges, « Dikpangourou » ou danse des chasseurs, « Abal » ou danse des vielles, « Lawa » ou danse populaire.
Outre les sites touristiques et patrimoines culturels, l’agriculture, une des richesses de la localité présente des produits diversifiés intéressants pour la gastronomie togolaise que le restaurant de l’hôtel peut utiliser pour attirer les clients et booster le tourisme dans la localité, a confié le directeur de l’hôtel. Ces atouts doivent amener les autorités à réhabiliter l’hôtel Bassar qui, servira de cadre, susceptible d’accueillir les touristes ou visiteurs pour une randonnée à la découverte de ces sites et patrimoines culturels.
Les faiblesses de l’hôtel Bassar
Quant aux faiblesses, elles constituent des défis que l’hôtel Bassar doit relever pour retrouver sa place à nouveau dans le secteur hôtelier. En effet, le directeur de l’hôtel souligne qu’à sa construction en 1974, il n’y a pas eu une politique pour agrandir l’hôtel, et sa gestion a manqué de plan d’action à court, moyen et long terme.

Avec l’état de délabrement des infrastructures, les prestations se limitent à l’hébergement et au bar. C’est dire que le délabrement a porté un coup dur au fonctionnement de l’hôtel. Le personnel est réduit à 4 agents : un réceptionniste qui joue le rôle de directeur de l’hôtel, un cuisinier qui cumule le rôle de caissier, une serveuse et un gardien de nuit. Selon le directeur, depuis 1997, la structure est restée sous tutelle de l’hôtel central de Sokodé jusqu’au 1er juillet 2021 avec la nomination d’un directeur. Le personnel employé entre 1997 et 2012 n’a jamais perçu de salaire.
Les ressources de l’hôtel se résument seulement aux rares recettes d’hébergements avec des chambres sans postes téléviseurs ni téléphones, sans système de chauffage d’eau, de climatiseurs adéquats, ni réseau internet. La demande en restauration est restée faible. L’hôtel ne dispose pas de mécanisme de promotion ou de marketing des produits. Le site de l’hôtel n’est pas clôturé laissant libre cour aux habitants de son voisinage d’en faire un lieu de défécation à l’air libre et autres actes d’insalubrité.
De la nécessité de relancer les activités de l’hôtel Bassar
Mme Sonhaye Bossa Céline, opératrice économique et M. Napo Koffi, natif du milieu, ont vu l’hôtel naître. Selon eux, eu égard au passé glorieux de cet hôtel, la relance de ses activités pour sa promotion s’avère nécessaire. « Nous avons suivi la construction de cet hôtel jusqu’à sa finition. C’est là que se tenaient de grandes rencontres c’était impeccable il n’y avait pas deux, les touristes venaient ; tous logeaient là-bas. Quand nous étions au lycée c’est là nous faisions nos soirées culturelles c’était très bon. L’hôtel a connu un passé très glorieux. Je suis triste de le voir délaissé aujourd’hui. Je prie les autorités de faire un effort pour le réhabiliter », a révélé Mme Sonhaye.
Le président du Comité cantonal de développement (CCD) de Bassar, Djabaré Essofa témoigne aussi. « Nous étions très jeunes et avons eu la chance de découvrir l’hôtel puisque à l’époque les touristes venaient et quand ils arrivent ils logeaient à l’hôtel. Nos parents y allaient pour les prestations de la danse de feu et d’autres. Il y avait des jeunes blancs qui venaient aussi avec leurs parents on allait pour tisser des relations avec eux c’était bon. Aujourd’hui l’hôtel a perdu toutes ces valeurs. Moi je trouve que c’est très nécessaire qu’on le réhabilite pour qu’il puisse relancer ses activités ».
Le président de l’ATV, Bassabi Lantame, donne d’autres motifs qui accentuent la nécessité de rénover cet hôtel. « Les sites de la métallurgie ancienne du fer à Bassar, à savoir les hauts fourneaux de Nangbani et de Bangeli sont en réhabilitation avec l’appui de l’ambassade de France au Togo. La route Sokodé-Bassar est également en plein travaux qui vont permettre d’ouvrir la ville à de nombreux visiteurs », a-t-il expliqué.
Le directeur de l’hôtel estime que, outre la réhabilitation des bâtiments, il est nécessaire de renforcer le personnel actuel au niveau de l’administration ainsi qu’au niveau de tous les services, notamment l’hébergement, la réception, les chambres, la cuisine et le restaurant, la buanderie-blanchisserie. Il propose également de créer d’autres gastronomies locales pour attirer les visiteurs, et d’initier des activités de loisirs dans la cour de l’hôtel. Selon lui, il faudrait aussi des salles de gymnastique, une piscine, du matériel de sonorisation, un véhicule pour le transport des touristes. M. Amona suggère que l’hôtel soit équipé d’une connexion internet haut débit, d’un réseau WIFI, d’un forage d’une bonne capacité de retenue d’eau pour renforcer le branchement de la Togolaise des Eaux.
Pour le chef du canton de Bassar, T’ba Yawanké Bitémi Waké Djintidja 2 et le maire de la commune de Bassar1, Gbati Djani Lantame Kokou, la réhabilitation de l’hôtel Bassar est souhaitée par toute la population de Bassar. « Le vœu le plus cher des fils et filles de Bassar et surtout des premières autorités de la localité est de voir un jour, relancer normalement les activités à l’hôtel Bassar pour le faire fonctionner comme un hôtel digne de ce nom pour le bien de tous », ont-ils confié.